3. J. PARAMELLE (avec la collaboration de E. LUCCHESI)
Philon d’Alexandrie, Question sur la Genèse II 1-7
Texte grec, version arménienne, parallèles latins. Interprétation arithmologique par J. SESIANO, 1984, 270 p. et 8 pll.
Sorte de condensé de la pensée philonienne, les Questions sur la Genèse, perdues dans l’original, ne nous sont parvenues dans leur ensemble que par le truchement d’une version arménienne (éd. AUCHER, Venise, 1826), à laquelle on peut ajouter à part entière l’utilisation latine d‘Ambroise: ce n’est pas sans à-propos qu’on parlera, même dans le second cas, de tradition indirecte.
Les fragments grecs transmis par les Chaînes et les Florilèges avaient été naguère réunis et excellemment édités par Françoise PETIT (Paris, 1978).
Le Père Joseph Paramelle a eu la bonne fortune de découvrir dans un manuscrit athonite (le Vatopedinus 659) — caché dans un fouillis d’emprunts à d‘autres commentaires sur la Genèse, et principalement aux Glaphyres de Cyrille d’Alexandrie —, le texte grec inédit, complet pour la première moitié, des Questions 1 à 7 du IIe Livre, dont seuls deux fragments minuscules nous restituaient jusqu’ici la teneur originale. Ces sept Questions, remarquables à plus d’un titre, on trait à la structure et au symbolisme de l’arche de Noé (Gen. 6, 14-16), que Philon met en relation avec l’anatomie du corps humain. Les allégories toutes philoniennes qui en résultent ont dû être très en vogue dans l’Antiquité chrétienne, pour que saint Augustin s’en soit fait l’écho à deux reprises, sur un ton réprobateur soit dit en passant.
La traduction arménienne et les passages parallèles du De Noe et arca d’Ambroise sont dûment mis à contribution dans la présente édition. Pour la première fois, et sur une étendue appréciable, sont collationnés les trois témoins grec, arménien et latin; ce qui équivaut à un véritable test pour chacun d’eux. Les conclusions critiques auxquelles aboutit cette comparaison ne sont pas sans revêtir une portée générale.
Outre ces quelques pages récupérées de l’authentique Philon, le volume apporte deux nouveautés. D’abord, l’analyse partielle, mais déjà fort suggestive, d’un ms. aussi original par son contenu que par sa mise en pages: elle piquera la curiosité du codicologue, mais encore du spécialiste des Apocryphes, et plus d’un patristicien ou d’un byzantiniste y trouvera ce que, sur la foi du titre, il n’aurait pas songé à y chercher.
Ensuite, l’Appendice rassemble 14 textes de Philon — de quelques lignes à deux pages —, tirés de huit des traités conservés en grec, extraits dispersés à travers tout le Vatopedinus. Chacun fait l’objet d‘une étude fouillée qui vise à le situer dans l’ensemble de la tradition, directe et indirecte, des œuvres de Philon: ce ne sont pas seulement les philonisants, mais tous les philologues, qui seront intéressés par ces discussions. M. Jacques Sesiano, de l’École Polytechnique de Lausanne, en historien des sciences, met à la portée du lecteur profane les développements arithmologiques de Philon. Grâce à sa compétence, on a pu remédier à quelques accidents de transmission. D’autre part, les sources philosophiques, explicites ou implicites, sont évoquées de façon brève mais précise, dans les Notes complémentaires qui suivent l’édition.
La valeur du volume est rehaussée par le triple index qui l’accompagne, surtout par le lexique complet arménien-grec du nouveau fragment, lexique appelé à rendre service bien au delà de la base littéraire restreinte qui fait l’objet de cette publication.
Ce livre est aussi — pourquoi ne pas le dire? — une merveilleuse leçon de philologie.
Prix : 150 chf